Les enjeux en Nord Atlantique - Manche Ouest

Des écosystèmes et des paysages marins et littoraux, riches et variés mais fragilisés, marqueurs d’identités locales affirmées, une économie maritime forte d’activités maritimes historiques (pêche, aquaculture, tourisme) et de secteurs émergents (énergie, biotechnologies) et disposant d’infrastructures portuaires et industrielles de premier plan ainsi que d’un pôle scientifique et d’enseignement à rayonnement mondial.

Le caractère maritime structure fortement l’identité des six départements littoraux de Bretagne et Pays de la Loire, dotés d’un littoral marin découvrant largement à marée basse et de côtes très découpées. Une voie maritime majeure se trouve à la pointe de la Bretagne sur la route des grands ports maritimes de l’Europe du Nord, qui concentre un trafic avec des hydrocarbures ou divers produits chimiques dans des conditions météorologiques souvent difficiles en saison hivernale.
La façade maritime Nord Atlantique – Manche Ouest possède des écosystèmes et des paysages marins et littoraux, riches, variés et fragilisés, marqueurs d’identités locales affirmées, attractifs pour les touristes et les entreprises. Il en résulte une forte attractivité démographique qui génère de nombreuses pressions (artificialisation des sols, consommation d’eau) sur les équilibres naturels, terrestres et maritimes.

Pêche et aquaculture professionnelles sont très présentes sur la façade, elles sont en évolution et en compétition avec des filières émergentes à fort potentiel (énergies marines renouvelables et biotechnologies) pour l’accès à l’espace et aux ressources maritimes et littorales. La façade se caractérise également par un réseau de ports militaires, de commerce, de pêche et de plaisance avec à sa tête le grand port maritime de Nantes-St-Nazaire, premier port de l’Atlantique, ainsi que des activités militaires en mer, des bases navales et aéronavales ainsi que plusieurs sites industriels de défense.

Les risques naturels (submersion, érosion) sont prégnants mais inégalement répartis sur le littoral et des risques industriels sont concentrés dans les zones portuaires.

La connaissance du milieu marin et des interactions avec les activités humaines est partielle, mais la recherche, l’innovation et un réseau de formation structurés et actifs sont des marqueurs forts de la façade (présence du pôle mer Bretagne Atlantique, réseau de recherche et d’écoles).
La forte implication des acteurs de la mer et du littoral, portée par différentes instances dont la conférence et l’assemblée régionales pour la mer et le littoral de Bretagne et des Pays de la Loire, est un atout considérable pour faire face à tous ces enjeux.

Les enjeux écologiques

Sous-région marine Mers celtiques

Conditions hydrographiques, habitats pélagiques et réseaux trophiques

Le fonctionnement écologique de la sous région marine mer celtique est très fortement conditionné par la présence d’un front thermique (Ouessant) qui se forme du printemps à la fin de l’été à l’entrée de la Manche entre les eaux côtières froides et brassées et les eaux du large plus chaudes et stratifiées. Ce phénomène, à l’origine d’une forte production primaire et secondaire, va structurer le réseau trophique de la sous région marine.
À la côte, plusieurs zones d’interface terre mer (baie de Saint Brieuc, Baie de Lannion, Rade de Brest et Baie de Douarnenez) sont le siège d’une production primaire printanière. Les zones de forts courants (Iroise) et de fort marnage (Baie de St Brieuc) constituent également des habitats pélagiques particuliers.

Enfin, le talus océanique est le siège d’un front permanent, entretenu par le passage régulier de l’onde de marée de la Manche, qui permet la remontée d’éléments nutritif et la mise en place d’un écosystème productif.
Les communautés planctoniques de ces habitats et les espèces de petits poissons pélagiques (notamment le maquereau et la sardine) occupent une place importante dans les réseaux trophiques de la sous région marine.

Habitats benthiques et structures géomorphologiques

À la côte, les habitats rocheux couvrent des surfaces importantes. En milieu intertidal et infralittoral, ils sont abondamment colonisés par les fucales et les laminaires (notamment en mer d’Iroise). Ces milieux rocheux sont entrecoupés de fonds sédimentaires majoritairement grossiers où se développent d’importants bancs de maërl, herbiers de zostère marine et récifs d’hermelles. On y trouve aussi des bancs de sables coquilliers, parfois très mobiles. La majorité des surfaces françaises de ces cinq habitats biogéniques (laminaires, maërl, zostère marine, récifs d’hermelles et sables coquilliers) est localisée au sein de la sous-région marine, ce qui lui confère une responsabilité particulière pour leur conservation. On note également la présence de petits herbiers de zostère naine notamment dans le Trégor. Enfin, la rade de Brest reste l’un des derniers gisements naturels d’huîtres plates (habitat OSPAR).

Plus au large, les fonds sont constitués de sédiments grossiers et de fonds hétérogènes qui forment des grands systèmes de dunes sous marines au centre de la Manche et au large de la pointe bretonne. Le talus océanique présente une biodiversité remarquable en particulier au niveau des canyons de Sorlingue et de petite Sole. Dans ce dernier, se situe le plus grand massif de coraux observé sur le talus Atlantique. D’autres biocénoses comme les scléractiniaires coloniaux et les communautés de crinoïdes sont également bien représentées. En limite de pente, les bancs de l’Espérance forment sous l’influence de l’onde de marée de la Manche des dunes hydrauliques parallèles au talus, structures atypiques.

Zones fonctionnelles pour les espèces marines

De part ses côtes rocheuses et ses nombreux îlots, la sous région marine mer celtique est de loin la plus importante pour la reproduction du phoque gris et pour la nidification des oiseaux marins (alcidés, fous, océanite tempête, cormoran huppé et goéland marin) et, dans une moindre mesure de limicoles côtiers (huîtrier pie et grand gravelot). Par ailleurs, les archipels en zones de forts courants et de fort marnage constituent des zones fonctionnelles particulièrement propices pour les colonies de phoques gris (archipel des Sept-Îles et mer d’Iroise) et les groupes sédentaires de grands dauphins (golfe normand-breton et mer d’Iroise).
Enfin, les baies et estuaires (baie de St Brieuc, de Lannion, de Goulven, de Douarnenez et rade de Brest) constituent des zones d’abri et d’alimentation importantes pour les espèces marines (puffin des Baléares, harle huppée et plongeon arctique). La rade de Brest et les petits estuaires de la côte nord sont également fréquentés par les poissons amphihalins (anguilles, aloses, lamproies et saumon).

Plus au large le front thermique (Ouessant) constitue une zone importante en été pour les espèces d’oiseaux (fous, fulmar boréal, puffins, alcidés), les grands poissons pélagiques (requin), et les mammifères marins (marsouin et dauphin commun). La sous région marine est une zone de forte concentration au niveau européen pour cette dernière espèce. Le plateau et le talus continental de la mer Celtique constituent également une zone importante pour les cétacés, la tortue Luth et les grands poissons.

Pour les espèces halieutiques, les connaissances de la sous région marine sont assez parcellaires du fait de l’absence (jusqu’à très récemment) de campagne halieutique régulière en Manche Ouest. Des zones fonctionnelles halieutiques ont néanmoins été identifiées à dire d’experts. Il s’agit de frayères en centre Manche (araignée, bar, barbue, lieu jaune, limande, sole, sardine, sole, sprat, …), à la côte (raie bouclée, griset et seiche) ou sur le talus (chinchard, maquereau et merlu).
Des nourriceries ont également été identifiées à la côte pour de nombreuses espèces de poissons (lieu jaune, bar, barbue, plie, raie bouclée …) et de crustacés (tourteau, araignée, homard).

En outre, plusieurs espèces d’élasmobranches, présentant des statuts de conservation très défavorables au niveau mondial, sont présentes au sein de la sous région marine (raie blanche, ange de mer et pocheteaux). Le nord de la sous région marine (à la limite de la ZEE) a été identifié comme secteur de capture de « petit pocheteau gris ». La zone côtière de la sous région constitue quand à elle l’habitat historique de l’ange de mer.

Sous-région marine Golfe de Gascogne (partie Nord)

Conditions hydrographiques, habitats pélagiques et réseaux trophiques

Plusieurs habitats pélagiques particuliers ont été identifiés dans le Nord de la sous région marine golfe de Gascogne : la zone frontale associée au talus océanique, la zone du bourrelet froid et les upwellings de Bretagne Sud, les panaches estuariens (Loire et Vilaine) et les grandes baies abritées (golfe du Morbihan et baie de Bourgneuf). Ces secteurs sont le siège d’une production primaire et secondaire importantes qui structure les réseaux trophiques de la sous région marine. Les petits poissons pélagiques (notamment le maquereau et la sardine) y occupent une place centrale.

Habitats benthiques et structures géomorphologiques

Sur le plateau continental, la sous région marine est particulièrement représentative des vasières sublittorales avec les trois quarts des surfaces nationales. À la côte, les principales vasières sont localisées en face des estuaires de la Vilaine, de la Loire et au Nord-Est des Glénan auxquelles il faut ajouter les estrans vaseux du golfe du Morbihan et de l’estuaire de la Loire. Certaines vasières (Baie de Concarneau, Vilaine et Loire) sont parfois colonisées par des peuplements à haploops (petits crustacés vivant dans des tubes) peu connus à ce jour et qui présentent une faune associée originale et des fonctions écologiques sans doute uniques. En baie de Concarneau, ces fonds sont associés à des pockmarks, dépressions sédimentaires liées à l’émission de méthane.
Plus au large, en domaine circalittoral, la grande vasière couvre un vaste espace (près de 20 000km2) s’étendant de la pointe de Penmarc’h jusqu’au plateau de Rochebonne sur une profondeur de 50 à 120 m. Elle constitue une zone remarquable de la région marine (habitats de la Convention OSPAR) et constitue un habitat essentiel pour de nombreuses espèces (dont langoustine et merlu). La présence de pennatules atteste des zones les moins perturbées.
Les habitats rocheux représentent de vastes surfaces au large de Noirmoutier et de l’estuaire de la Loire, entre Belle-Île, Quiberon et Groix et entre Penmarc’h et les Glénan. En milieu côtier, ils sont abondamment colonisés par les fucales et les laminaires. Ces ceintures d’algues jouent un rôle clé en offrant un habitat pour tout un cortège d’espèces animales (notamment les espèces d’intérêt commercial comme l’ormeau, les crevettes et les tourteaux) et végétales (algues rouges).Des zones plus sableuses s’intercalent à la côte entre ces habitats vaseux et rocheux. Certains habitats biogéniques (« construits » par des espèces) présentent des fonctionnalités écologiques importantes et constituent des enjeux particuliers : les bancs de maërl (notamment aux Glénan et dans le Mor Braz), les herbiers de zostères marines et naines (avec des surfaces importantes dans le golfe du Morbihan), les récifs d’hermelles intertidaux (au niveau de Noirmoutier et en baie de Bourgneuf) et subtidaux (Groix, Belle-Île et Yeu), les bancs d’huîtres plates (baie de Quiberon) et sur le haut de l’estran les herbiers du schorre (Morbihan et Loire- Atlantique). Plus au large, entre la grande vasière et le talus, les sédiments sont majoritairement sableux.

Le secteur Nord du talus océanique présente une forte diversité géomorphologique. On signalera, en limite de pente, les bancs de la Chapelle (dunes hydrauliques parallèles au talus formées sous l’influence de la marée de la Manche), le môle inconnu (dôme rocheux isolé) et en contrebas, le plateau de Meriadzeck (vases bathyales par plus de 2000 mètres colonisées par les gorgones et les pennatules) et enfin l’escarpement de Trevelyan (relief profond sur lequel il existe peu de données). Le talus océanique et les canyons qui l’entaillent, à des profondeurs allant de 160 à 2000 m, présentent également une diversité biologique maximale dans le nord de la sous-région marine. Les coraux d’eaux froides (notamment les coraux blancs) qui s’y développent forment des récifs, habitats pour de nombreuses espèces fixées ou mobiles (poissons, crustacés, mollusques, éponges, échinodermes, vers, …). La biodiversité peut y être 3 fois plus importante que sur les sédiments meubles environnants. Les canyons du Guilvinec, de l’Odet et de Morgat présentent plus de la moitié des surfaces de récifs de coraux ou de débris de récifs observées. Les canyons de Lampaul, Guilcher et Douarnenez sont quant à eux remarquables par la diversité des habitats qui y ont été observés.

Zones fonctionnelles pour les espèces marines

Les eaux côtières du Nord du golfe de Gascogne constituent une zone importante de concentration de l’avifaune marine en particulier en été (notamment pour le puffin des Baléares qui est menacé au niveau mondial), pour le requin pèlerin au printemps et en été et dans une moindre mesure pour les petits cétacés. Ceci est vraisemblablement lié aux structures hydrographiques (bourrelet froid, upwellings et panaches estuariens). En hiver, les delphinidés et marsouins sont particulièrement présents dans les secteurs compris entre 50 et 100m de profondeur. Les oiseaux marins sont beaucoup moins nombreux en mer. Le golfe du Morbihan et l’estuaire de la Loire constituent néanmoins des sites d’hivernage importants au niveau international pour les oiseaux côtier. Les nombreuses îles et îlots distribués dans la bande côtière constituent des secteurs importants pour la nidification de l’avifaune marine (sternes, goélands, cormoran huppé et mouette mélanocéphale). En milieu arrière littoral, le marais breton est un site majeur pour les limicoles nicheurs (avocette, échasse blanche et chevalier gambette), tandis que le littoral breton est fréquenté par le gravelot à collier interrompu.
La zone du talus océanique est une zone fonctionnelle majeure à l’échelle européenne pour la mégafaune marine. On y observe toutes les espèces de cétacés du golfe (delphinidés, globicéphale, dauphin de Risso, cachalot, baleine à bec et rorquals), les oiseaux pélagiques (océanites, puffins, fous, fulmar, mouettes) ainsi que les grands poissons (requins, thons…).

Les milieux vaseux sous l’influence des panaches estuariens, les baies et les herbiers du schorre sont des secteurs majeurs pour les espèces halieutiques puisqu’elles ont un rôle de nourriceries (céteau, plie, sole, turbot, anguille, bar, crevette grise, sardine…) et de frayères (anchois, sardine, sole). En outre, la grande vasière est une frayère et une nourricerie majeure pour le merlu et la langoustine. Le talus occidental est une frayère importante pour de nombreuses espèces d’intérêt commercial (chinchard, maquereau, merlu, sardine.)
La Loire et la Vilaine sont les deux fleuves majeurs pour les amphihalins (aloses, lamproies, saumon et anguille). Ces mêmes espèces se distribuent également dans les petits fleuves bretons.
En outre, plusieurs espèces d’élasmobranches, présentant des statuts de conservation très défavorables au niveau mondial, sont présentes au sein de la sous- région marine (raie blanche, ange de mer et pocheteaux par exemple). La zone des Glénan constitue un secteur de capture du « petit pocheteau gris ».

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Les enjeux socio-économiques

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