Gestion intégrée de la mer et du littoral

Une ambition d’approche globale des enjeux sur la mer et le littoral, qui s’appuie sur des instances de concertation au niveau national et dans chaque façade et bassin maritime

La France a fait le choix d’une gestion intégrée de la mer et du littoral dont les principes sont posés dans le chapitre IX « Politiques pour les milieux marins » du titre 1er « Eaux et milieux aquatiques et marins » du livre II « Milieux physiques » de la partie législative du Code de l’Environnement (articles L219-1-A et suivants). Ses objectifs sont la protection des milieux, pour la réalisation ou le maintien du bon état écologique, l’utilisation durable des ressources marines et la gestion cohérente et concertée des activités liées à la mer et au littoral.

Par « intégrée » il faut comprendre une approche qui considère l’ensemble des enjeux, qu’ils soient relatifs aux usages, aux secteurs d’activités, à l’environnement ou encore aux questions sociales et culturelles. Elle s’attache à croiser les conséquences des décisions prises en regard de chacun de ces enjeux et à analyser les interactions entre les espaces terrestres et maritimes, pour trouver les meilleures conditions d’un développement durable.

Sa mise en œuvre repose notamment sur des instances de concertation (conseil national de la mer et des littoraux et conseils maritimes de façade et bassin maritime) et un processus de planification stratégique : une stratégie nationale et des documents stratégiques qui la mettent en œuvre au niveau des façades et bassins maritimes.


 

Concertation

La politique de gestion intégrée de la mer et du littoral repose sur un dialogue permanent au sein d’instances de concertation au niveau national et au niveau de chaque façade maritime et bassin maritime.

  • Le Conseil national de la mer et des littoraux (L219-1-A du code de l’environnement)
    • Dédié à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la mer et des littoraux et la gestion intégrée des zones côtières, il est présidé par le Premier ministre ou, en son absence, par le ministre chargé de la mer. Il comprend à parité, d’une part, des élus et, d’autre part, des représentants des établissements publics intéressés, des milieux socio-professionnels et de la société civile représentatifs des activités et des usages du littoral.
    • Il est consulté sur textes législatifs ou réglementaires relatifs à la mer et aux littoraux, sur les priorités d’intervention et les conditions générales d’attribution des aides de l’Etat. Il peut être consulté sur les projets définis en application des contrats passés entre l’Etat et les régions.
    • Il a de façon générale un rôle de proposition auprès du Gouvernement. Il est associé en particulier au suivi de la mise en œuvre de la loi Littoral et au suivi de la mise en œuvre de la stratégie nationale de la mer et du littoral.

Activités du Conseil national de la mer et des littoraux

  • Un conseil maritime pour chacune des 4 façades maritimes de métropole (L219-6-1 du code de l’Environnement)
    • Présidé par les préfets coordonnateurs de façade, il est composé de représentants de l’Etat, des collectivités territoriales, de leurs établissements publics, des ports décentralisés, des professionnels du littoral et de la mer, de la société civile et des associations de protection de l’environnement.
    • Il émet des recommandations sur tous les sujets relevant de sa compétence et notamment sur la cohérence de l’affectation des espaces en mer et sur le littoral. Il identifie les secteurs naturels à protéger en raison de la richesse de la faune et de la flore, les secteurs propices au développement des activités économiques, y compris l’aquaculture, et les secteurs pouvant faire l’objet d’une affectation future.
    • Il est associé à l’élaboration du document stratégique de façade maritime.
  • Un conseil maritime pour chacun des 4 bassins maritimes ultramarins (L219-6-2 du code de l’Environnement)
    • Présidé par les préfets coordonnateurs de bassin maritime, il est composé de représentants de l’Etat, des collectivités territoriales, des entreprises, des organisations syndicales, des associations de protection de la nature et d’usagers et de personnalités qualifiées. La particularité du conseil de bassin maritime de Saint Pierre et Miquelon est d’être co-présidé par le Président de la Collectivité.
    • Il émet des recommandations sur tous les sujets relevant de la mer et du littoral.
    • Une commission spécialisée dite " du document stratégique de bassin maritime ", est chargée de l’élaboration de celui-ci. La particularité de cette commission est de n’être constitué que des membres des collèges représentant l’Etat et les collectivités au sein du conseil.

Au-delà de ces instances de concertation prévus par la loi, plusieurs Régions ont pris l’initiative de mettre en place des lieux de dialogue régionaux permanent sur la mer et le littoral :

  • Parlement de la mer des Hauts-de-France
  • Conférence régionale de la mer et du littoral de Bretagne
  • Assemblée régionale de la mer et du littoral des Pays de la Loire
  • Parlement de la mer d’Occitanie
  • Parlement de la mer de Provence-Alpes-Côte d’Azur

Enfin, les exigences de concertation avec le public qui sont une constante en droit français s’appliquent à la politique de gestion intégrée de la mer et du littoral. La réglementation prévoit même explicitement une obligation de saisine de la Commission Nationale de Débat Public pour ce qui concerne les documents stratégiques de façade maritime.

Décision

Le pilotage par l’Etat de la politique mer et littoral s’appuie :


- Au niveau national sur :

    • le Secrétariat d’Etat chargé de la mer (www.mer.gouv.fr, décret d’attribution) : par délégation de la Première ministre, il élabore et met en œuvre la politique du Gouvernement dans le domaine de la mer sous ses divers aspects, nationaux et internationaux, notamment en matière d’économie maritime, de rayonnement et d’influence maritimes.
    • le Comité interministériel de la mer (Décret n°95-1232 du 22 novembre 1995) : il est chargé de délibérer sur la politique du Gouvernement dans le domaine de la mer sous ses divers aspects nationaux et internationaux et de fixer les orientations de l’action gouvernementale dans tous les domaines de l’activité maritime, notamment en matière d’utilisation de l’espace, de protection du milieu, de mise en valeur et de gestion durable des ressources de la mer, de son sol, de son sous-sol et du littoral maritime.
      - A l’échelle des façades et bassins maritimes sur :
  • Dans les outre-mer (R219-1-17 du code de l’Environnement), les préfets :
    • Bassin maritime des Antilles, les préfets de Martinique et de Guadeloupe
    • Bassin maritime de Guyane, le préfet de Guyane
    • Bassin maritime de l’Océan indien, les préfets de la Réunion, Mayotte et des Terres australes et antarctiques françaises
    • Bassin maritime de Saint Pierre et Miquelon, le préfet de Saint Pierre et Miquelon
  • Dans les façades maritimes de métropole (R219-1-6 du code de l’Environnement) des préfets coordonnateurs :
    • Méditerranée, le préfet de Provence-Alpes-Côte d’Azur et le préfet maritime de la Méditerranée
    • Sud-Atlantique, le préfet de Nouvelle-Aquitaine et le préfet maritime de l’Atlantique
    • Nord Atlantique – Manche Ouest, le préfet des Pays de la Loire et le préfet maritime de l’Atlantique
    • Manche Est – mer du Nord, le préfet de Normandie et le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord
  • Et les Commissions administratives de façade maritime (R219-1-9 du code de l’environnement) qui réunissent, sous l’autorité des préfets coordonnateurs, les responsables de l’Etat et de ses établissements publics concernés.

Stratégie nationale et documents stratégiques de façade et de bassin maritime

La stratégie nationale pour la mer et le littoral

La stratégie nationale pour la mer et le littoral traite, dans une perspective de gestion intégrée, des six thèmes suivants (R219-1-1 du code de l’Environnement) :

  • la protection des milieux, des ressources, des équilibres biologiques et écologiques ainsi que la préservation des sites, des paysages et du patrimoine ;
  • la prévention des risques et la gestion du trait de côte ;
  • la connaissance, la recherche et l’innovation ainsi que l’éducation et la formation aux métiers de la mer ;
  • le développement durable des activités économiques, maritimes et littorales et la valorisation des ressources naturelles minérales, biologiques et énergétiques ;
  • la participation de la France à l’élaboration et à la mise en œuvre de politiques internationales et européennes intégrées pour la protection et la valorisation des espaces et activités maritimes ;
  • la gouvernance associée à la stratégie, les moyens de sa mise en œuvre et les modalités de son suivi et de son évaluation.

Pour chacun de ces thèmes, la stratégie prévoit des objectifs à long terme et à échéance de six ans. Elle identifie un dispositif et des indicateurs de suivi, afin de permettre l’élaboration du rapport que le Gouvernement dépose, tous les trois ans devant le Parlement, conformément à l’article 41 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.

Elle intègre également la promotion de la dimension maritime des outre-mer, tant pour leur développement économique endogène que pour leur insertion dans leur environnement régional.

Elle précise les modalités selon lesquelles les documents stratégiques de façade et de bassin traduisent et complètent ses orientations et principes.

Les documents stratégiques de façade maritime (R219-1-7 du code de l’Environnement)

Ils sont élaborés dans le souci constant d’atteinte ou de maintien du bon état écologique des eaux marines qui vise à conserver les fonctionnalités des écosystèmes et la diversité écologique du milieu marin tout en favorisant le développement durable des activités. L’objectif est ainsi de sauvegarder le potentiel des océans tant pour leurs caractéristiques et propriétés intrinsèques que pour les générations actuelles et à venir.

Ils sont organisés en 4 parties :

  1. La situation de l’existant dans le périmètre de la façade maritime.
    Elle comprend un diagnostic de l’état de l’environnement littoral et marin. Elle présente, y compris de façon cartographique, les usages de l’espace marin et littoral ainsi que les interactions terre-mer, les activités économiques liées à la mer et à la valorisation du littoral, les principales perspectives d’évolution socio-économiques et environnementales et les activités associées. Elle identifie également les principaux enjeux et besoins émergents de la façade, en tenant compte des conflits d’usage existants ou prévisibles. Elle s’appuie sur les meilleures données disponibles ;
  2. La définition des objectifs stratégiques et des indicateurs associés.
    Ces objectifs sont environnementaux, sociaux et économiques. Ils sont assortis de la définition et de la justification des conditions de coexistence spatiale et temporelle des activités et des usages considérés et de l’identification, dans les espaces maritimes, des zones cohérentes au regard des enjeux et objectifs généraux qui leur sont assignés, tant par le document que par ceux issus d’autres processus. Ils font l’objet de représentations cartographiques ;
  3. Les modalités d’évaluation de la mise en œuvre du document stratégique. Cette partie comprend la définition d’un ensemble de critères et d’indicateurs pertinents ;
  4. Un plan d’action.
     

Les documents stratégiques de bassin maritime (R219-1-23 du code de l’Environnement)

Ils sont élaborés dans le même but que les documents stratégiques de façade maritime, mais dans des contextes institutionnels (compétences des collectivités) et géographiques (des tailles et des environnements régionaux très différents) particuliers qui imposent une approche différenciée pour chacun.

Le document stratégique de bassin maritime précise et complète les orientations de la stratégie nationale pour la mer et le littoral au regard de ses enjeux économiques, sociaux et écologiques propres.

Sous réserve des compétences reconnues aux collectivités, il traite des quatre premiers thèmes de la stratégie nationale mentionnés ci-dessus. Il peut en outre préciser l’application des éléments propres à la gouvernance prévue par les conventions et accords internationaux, en fonction des spécificités du bassin.

Le document stratégique de bassin maritime décrit la situation de l’existant dans le périmètre du bassin, notamment l’état de l’environnement tant en mer que sur le littoral. Il expose également les conditions d’utilisation de l’espace marin et littoral, les activités économiques liées à la mer et à la valorisation du littoral, ainsi que les principales perspectives d’évolution socio-économiques et environnementales et les activités associées.

Il définit et justifie les orientations retenues en matière de développement des activités maritimes, de protection des milieux, de surveillance et de contrôle, d’équipement et d’affectation des espaces aux différents usages, en mer comme sur le littoral, ainsi que les mesures destinées à les mettre en œuvre. Il peut dans ce cadre définir la vocation particulière de zones déterminées.

Le régime d’opposabilité juridique des documents stratégiques de façade et de bassin maritime

Le régime d’opposabilité juridique des documents stratégiques de façade et de bassin maritime, défini à l’article L. 219-4 du code de l’environnement, est le suivant :

Doivent être compatibles, ou rendus compatibles, avec les objectifs et dispositions du document stratégique de façade ou de bassin maritime :

  • Les plans, les programmes et les schémas relatifs aux activités exclusivement localisées dans les espaces maritimes sous souveraineté ou sous juridiction nationale, les fonds marins et le sous-sol de la mer, ainsi que les projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements, publics et privés, soumis à étude d’impact.
  • Les permis exclusifs de recherche et les concessions mentionnées respectivement aux articles L. 122-1 et L. 132-2 du code minier lorsqu’elles concernent des substances minérales autres que celles qui relèvent du régime légal des mines (énumérées à l’article L. 111-1 du code minier).
  • Les schémas de mise en valeur de la mer ;
  • Les schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine prévus à l’article L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime ;
  • Les schémas de cohérence territoriale et, à défaut, les plans locaux d’urbanisme, les documents en tenant lieu et les cartes communales, notamment lorsqu’ils sont susceptibles d’avoir des incidences significatives sur la mer.

Les plans, les programmes et les schémas applicables aux espaces maritimes sous souveraineté ou sous juridiction nationale, les fonds marins et le sous-sol de la mer et aux territoires des régions administratives côtières ou des collectivités d’outre-mer, qui ne figurent pas dans la liste précédente et qui sont susceptibles d’avoir des incidences significatives sur la mer, doivent prendre en compte le document stratégique de façade ou de bassin maritime.

La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages du 8 août 2016 prévoit qu’après l’approbation du document stratégique de façade, la mise en compatibilité ou la prise en compte se fasse à l’occasion de la révision des documents concernés ou en tout état de cause sous trois ans.

Dimensions européennes

La France partage au niveau européen les enjeux de sa politique maritime dans le cadre de la Politique maritime intégrée de l’Union Européenne. Elle constitue une approche globale de toutes les politiques de l’Union européenne relatives à la mer. Elle repose sur l’idée qu’en coordonnant son vaste éventail d’activités interconnectées relatives aux océans, aux mers et aux côtes, l’Union peut davantage tirer profit de son espace maritime tout en diminuant l’impact sur l’environnement.

Les principaux objectifs et domaines d’action correspondants de la PMI [ COM(2007)0575 ] sont les suivants :

  • maximiser une exploitation durable des mers et des océans, afin de permettre la croissance des régions maritimes et côtières en ce qui concerne la navigation, les ports maritimes, les chantiers navals, les emplois maritimes, l’environnement et la gestion de la pêche ;
  • la mise en place d’un socle de connaissances et d’innovation pour la politique maritime au moyen d’une stratégie européenne globale pour la recherche marine et maritime ;
  • l’amélioration de la qualité de vie dans les régions côtières en favorisant le tourisme côtier et maritime, en créant une stratégie européenne de prévention des catastrophes et en développant le potentiel maritime des régions ultrapériphériques et des îles de l’Union ;
  • la promotion de la position de chef de file de l’Union dans les affaires maritimes internationales au moyen d’une coopération renforcée au niveau de la gouvernance internationale des océans et, à l’échelle européenne, au moyen de la politique européenne de voisinage et de la dimension septentrionale ;
  • l’accroissement de la visibilité de l’Europe maritime au moyen de l’application internet « Atlas européen des mers », instrument permettant de mettre en évidence le patrimoine maritime commun à l’Europe, et de la célébration d’une Journée maritime européenne le 20 mai.

2 directives européennes permettent notamment de coordonner les efforts en partageant les objectifs, les méthodes et le suivi de la mise en œuvre en ce qui concerne la métropole :

  • La directive cadre « stratégie pour le milieu marin » (directive 2008/56 du 17 juin 2008 modifiée par la directive 2017/845 du 17 mai 2017) qui vise l’atteinte ou le maintien du bon état écologique des milieux marins, pour une mer saine, propre et productive.
  • La directive cadre « planification des espaces maritimes » (directive 2014/89 du 23 juillet 2014) établit un cadre pour la planification maritime et demande aux États membres d’assurer une coordination des différentes activités en mer.

En droit français, la mise en œuvre de ces 2 directives a été transposée au travers des textes régissant la politique de gestion intégrée de la mer et du littoral, comme 2 aspects particuliers traités par les documents stratégiques de façade maritime.

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