Qu’est-ce que la planification en mer et sur le littoral ?
L’espace maritime et littoral français abrite un patrimoine naturel exceptionnel et porte un potentiel de développement social et économique unique. Objets de nombreux usages, la mer et le littoral sont soumis à d’importantes pressions : urbanisation, artificialisation des sols, pollutions maritimes et terrestres… Pour répondre à ces enjeux, la France a adopté en 2017 une Stratégie nationale pour la mer et le littoral, qui définit une politique maritime ambitieuse pour le XXIe siècle. L’objectif est d’ atteindre, dans une perspective de développement durable, un usage optimal de la mer et du littoral et d’améliorer la prise en compte réciproque de l’ensemble de ses enjeux.

Qu’est-ce que la planification en mer et sur le littoral ?
Vecteur de bien-être économique et social, l’espace maritime et littoral accueille de nombreuses activités. Les multiples dimensions de l’espace maritime (espace aérien, surface, colonne d’eau, sol, sous-sol et temps) sont des atouts pour favoriser des modalités de cohabitation, souvent établies de façon ancienne.
Des conflits entre des activités en concurrence de développement ou avec des activités émergentes peuvent cependant survenir au sein de ces espaces de plus en plus convoités.
En effet, les activités maritimes et littorales dépendent des ressources vivantes, énergétiques et minérales de ces écosystèmes, du support qu’ils leur offrent ou encore de leur faculté à réguler des phénomènes naturels (cycle du carbone, épuration de l’eau, etc.). Elles peuvent parfois s’exercer au-delà de la capacité de résilience des écosystèmes marins et littoraux.
Dans un contexte de diversification et de densification des enjeux maritimes et littoraux, il est donc nécessaire de favoriser et sécuriser le développement durable des activités et la coexistence des usages qui se déploient selon des échelles de temps et d’espace différentes.
Dès les années 2000, la Commission océanique intergouvernementale de l’Unesco (COI-Unesco) s’est saisie de cet enjeu à travers l’initiative MSP (Maritime Spatial Planning). En promouvant une ambition citoyenne et politique forte en faveur d’un meilleur partage et d’une organisation plus raisonnée de ces espaces, la MSP a été proposée comme un outil de gouvernance mondiale à décliner par chaqur État et à l’échelle interrégionale.
L’Union européenne s’est également saisie de cet enjeu par le biais d’une directive-cadre dédiée à la planification de l’espace maritime (DCPEM - 2014), en complément de la directive-cadre stratégie pour la préservation des milieux marins (DCSMM - 2008) qui vise à maintenir ou restaurer un bon fonctionnement des écosystèmes marins tout en permettant l’exercice des usages en mer pour les générations futures dans une perspective de développement durable.
En France, l’État a adopté une stratégie nationale pour la mer et le littoral (SNML) :
- afin de développer une stratégie à long terme visant à soutenir la croissance durable dans les secteurs marin et maritime dans leur ensemble :
- en cohérence avec la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l’économie bleue qui entend refonder la politique maritime de la France et contribuer à l’amélioration de la compétitivité des entreprises concernées.
Cette stratégie, prise en application des articles L 219-1 et suivants du code de l’environnement, est élaborée en concertation avec le Conseil national de la mer et des littoraux.
La loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages assure, par son article 123, l’introduction dans le code de l’environnement d’un article L 219-5-1 spécifique dédié à la planification de l’espace maritime.
La planification en mer et sur le littoral prend donc en compte les enjeux généraux de l’environnement, de l’adaptation au changement climatique et de la limitation des effets du réchauffement du climat. Elle s’inscrit dans la perspective de la « croissance bleue », visant à optimiser l’exploitation durable dans les secteurs marins et maritimes. Elle tient également compte des acquis existants en matière d’organisation spatiale des activités maritimes (dispositifs de séparation de trafic, accords de la baie de Granville, implantations d’énergies marines renouvelables (EMR), etc.).
Quels sont les outils de la planification en mer et sur le littoral en France ?
Pour chacune des quatre façades maritimes de métropole, un document de planification – le document stratégique de façade – vient préciser les conditions de mise en œuvre de la stratégie nationale en fonction des spécificités locales. Il comporte une planification de l’espace maritime sous la forme d’une carte des vocations. Il est soumis à une évaluation environnementale. Le document stratégique de chaque façade est élaboré par l’État en concertation avec les acteurs maritimes et littoraux réunis dans le conseil maritime de façade.
Le principal outil de la planification est le document stratégique de façade. À l’échelle hexagonale, il couvre les espaces maritimes et littoraux délimités en façades. Elles sont au nombre de quatre : Manche Est – mer du Nord, Nord Atlantique-Manche ouest, Sud Atlantique et Méditerranée.
Ces façades s’étendent sur des périmètres qui incluent des dimensions à la fois maritime, aérienne et terrestre.
- Un périmètre maritime qui correspond aux eaux marines sous souveraineté et sous juridiction françaises : zone économique exclusive (maximum 200 milles) et extension du plateau continental. Le périmètre maritime est zoné en trois dimensions : surface, colonne d’eau et fonds marins.
- Un périmètre aérien : l’espace aérien sur jacent au périmètre d’application maritime.
- Un périmètre terrestre qui correspond aux activités situées sur le territoire des régions administratives côtières et ayant un impact sur les espaces maritimes. La profondeur du périmètre terrestre varie en fonction de l’activité étudiée.
Au regard de sa portée stratégique, la planification en mer et sur le littoral s’impose aux documents opérationnels qui s’appliquent à des échelles infra-façades. Elle doit également permettre de rendre lisible l’articulation des schémas de gestion et d’aménagement intéressant les espaces maritimes, en intégrant notamment les démarches de gestion intégrée des zones côtières préexistantes et les orientations retenues dans le cadre des schémas sectoriels (ex. SRADDET, SCoT).
Quelle articulation avec les autres politiques publiques en mer et sur le littoral ?
L’articulation du document stratégique avec les autres politiques publiques s’inscrit dans un rapport de compatibilité pour les documents suivants :
- les plans, les programmes et les schémas relatifs aux activités exclusivement localisées en mer ;
- en mer, les projets de travaux, d’ouvrages ou d’aménagements, publics et privés, soumis à étude d’impact et les permis exclusifs de recherche ou concessions concernant des substances minérales ;
- les schémas de mise en valeur de la mer ;
- les schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine.
En pratique, il s’agit de mettre en application les principes suivants :
- décliner la gestion intégrée de la mer et du littoral par les objectifs du document stratégique afin de renforcer l’interface terre-mer via notamment l’articulation avec la gestion des bassins versants et du littoral ou encore les initiatives locales des collectivités territoriales dans le cadre de la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) ;
- respecter les exigences environnementales fixées notamment au niveau européen, en particulier l’atteinte et le maintien du bon état écologique ainsi que du bon état de conservation des habitats et des espèces d’intérêt communautaire, en renforçant leur prise en compte par les différentes politiques sectorielles ;
- renforcer le processus de gouvernance au stade de l’élaboration des documents en définissant les modalités de coordination entre les différentes instances de concertation. Ainsi, lors de l’élaboration des documents stratégiques et des SDAGE, il est important que les structures porteuses se coordonnent entre elles et que les instances de concertation soient mobilisées de façon croisée (notamment les conseils maritimes et les comités de bassin et leurs commissions mer et littoral) ;
- développer des projets de territoire via la déclinaison du document stratégique aux différentes échelles de planification infra jusqu’à l’échelle intercommunale : SRADDET, DTADD, contrat de baie, volet maritime des SCoT valant SMVM, etc. ;
- mettre en perspective les planifications sectorielles existantes en recherchant la coordination intersectorielle dans une approche globale de développement des activités (ex. : SRDAM, document de planification de l’éolien en mer).
Les DSF s’articulent donc avec d’autres plans et programmes encadrés par le droit communautaire ou non. C’est ce qui explique que des consultations dédiées interviennent en parallèle de la consultation sur les documents stratégiques de façade. C’est actuellement le cas sur les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux et plans de gestion des risques inondation.